Le 1er octobre 2020

 

 

 

 

Covid 19 : restaurateurs et cafetiers sont-ils stupides ?

 

 

            Je ne parle pas de tous, bien sûr, mais de ceux qui déclarent qu'il est anormal qu'en raison de la Covid ils soient dans l'obligation de fermer plus tôt le soir, voire totalement, alors que transports, supermarchés, petits commerces, cinémas et autres restent ouverts. Leur argument ne tient pas debout, j'explique plus loin pourquoi.

Stupides ? En fait il est probable que certains n'ont tout simplement pas réfléchi et se contentent de répéter l'argument qu'ils ont entendu et qu'ils croient solide.

D'autres, certainement, ont bien compris que leur argument ne tient pas mais ne sont pas gênés par la mauvaise foi.

Car face à la Covid il y a une différence évidente entre restaurants ou cafés d'une part et transports en commun, supermarchés, petits commerces, cinémas... d'une autre. Cette différence c'est bien sûr le port du masque !

 

            Ce qui suit vaut pour les restaurants et cafés mais aussi pour toutes nos autres activités, en particulier lorsque nous partageons un apéritif, un repas, une soirée festive, avec parents, amis ou collègues de travail, chez l’un ou l’autre, puisqu’alors il faut enlever son masque.

 

           Même s’il n’est pas une garantie à 100 % (nous devons accepter que le risque zéro n’existe pas) le masque filtre tout ce qui peut atteindre notre nez et notre bouche et pénétrer ensuite dans nos poumons par le processus naturel de la respiration. Ainsi il nous protège des autres. De la même façon il filtre (sans garantie à 100 %) tout ce qui vient de nos poumons et sort par notre nez ou notre bouche, dont les virus que nous portons éventuellement, et ainsi il protège les autres de nous. Il est clair que les visières transparentes ouvertes dessous n’ont pas du tout la même efficacité puisqu’il n’y a aucun filtre entre nos poumons et l’air extérieur. Elles ne nous protègent que du souffle direct d’un interlocuteur mais pas du contenu de l’air ambiant que nous inhalons et si nous sommes malades nous envoyons nos virus sous la visière.  

 

Pardon de revenir au b.a.-ba. Lorsque l’on respire, par le nez ou la bouche, il y a deux temps. D’abord on inspire et l’air entre dans nos poumons, il les gonfle. Puis on expire en soufflant. Cela fournit à notre organisme l’oxygène dont il a besoin et cela permet de le libérer du dioxyde de carbone (gaz carbonique). Notre respiration s’effectue de façon inconsciente et s'adapte aux besoins de notre organisme, à l’effort qu’il fournit. Par ailleurs chaque virus de la Covid mesure moins d’un micron (un millième de millimètre) c’est-à-dire que si vous pouviez mettre côte à côte 1000 virus, vous obtiendriez une longueur inférieure à 1 mm.

 

Je vous invite à faire une petite expérience. Mettez votre main à environ 2 ou 3 cm de votre bouche, paume tournée vers la bouche, et dites d’une voix douce (donc pas forte) : « je parle fort ». Allez-y… Que constatez-vous ? Vous avez senti sur la paume de votre main un souffle un peu chaud et humide. Ce souffle vient de vos poumons c’est pourquoi il est chaud. Si vous avez 37° de température, c’est la température intérieure de votre corps donc de vos poumons. Vous inspirez l’air ambiant, par exemple à 25°, il est réchauffé dans vos poumons et ressort (tout ne ressort pas) un peu en dessous de 37°. Recommencez : d’une voix douce dites « je parle fort ». Vous retrouvez la même sensation. Maintenant, en gardant la main toujours placée de la même façon devant votre bouche, à la même distance, mais cette fois-ci en parlant effectivement fort, très fort, dites à nouveau « je parle fort ! ». Faites-le… Que constatez-vous ? Vous ressentez la même chose mais cette fois-ci avec un souffle nettement plus fort. Vos poumons ont rejeté plus d’air. Cela n’a rien de très surprenant mais cela permet de percevoir ce qui sort des poumons et que l’on ne voit pas. On comprend aussi que plus on parle fort plus on rejette en expirant une quantité importante d’air, donc une quantité plus importante de particules virales si nous avons un virus, et donc nous avons plus de risques de contaminer quelqu’un d’autre. Et si nous sommes bien portants, puisque l’on expire davantage en parlant fort, nous devons alors inspirer davantage et cela augmente pour nous le risque de « récupérer » dans l’air les particules virales qui peuvent s’y trouver, venant par exemple de la personne avec laquelle on discute, qui peut être asymptomatique et pourtant avoir la Covid.  Il faut aussi comprendre qu’un ventilateur dans une pièce, comme le vent à l’extérieur, peut envoyer bien plus loin tout ce qu’il y a dans l’air.

Un gros inconvénient du coronavirus-19 par rapport à beaucoup d’autres virus est que l’on peut en être porteur sans le savoir, en ne présentant aucun symptôme. Lorsque l’on a la grippe ou une angine ou une gastro virale (causée par un virus) il est rare que l’on ne s’en aperçoive pas. Mal à la tête, à la gorge ou au ventre, courbatures, température, perte d’appétit, grande fatigue, les signes ne manquent pas. Il nous arrive à tous, en général à l’automne ou en hiver, d’aller vers un collègue de travail ou un ami ou un parent pour le saluer et de l’entendre nous dire : « ne t’approche pas, j’ai la crève ». C’est bien la formule le plus souvent employée en pareil cas. Le malade a alors bien conscience d’être malade… et contagieux. Et nous apprécions sa sagesse, son souci de ne pas nous contaminer. Le problème avec la Covid c’est qu’un individu peut l’avoir sans le savoir, sans être apparemment malade. Donc les personnes vont normalement les unes vers les autres et lorsque l’une est porteuse de la Covid, le virus se répand… sauf si nous respectons les gestes barrière : lavage très fréquent des mains, distanciation physique, port du masque. Ces mesures ne sont pas une garantie absolue mais plus elles sont appliquées avec soin, plus elles diminuent considérablement les risques.

 

Pourquoi faut-il se laver très souvent (et soigneusement) les mains ? Ce n’est pas une nouveauté due à la Covid. Lorsqu’il y a une épidémie importante de grippe ou de gastro les autorités sanitaires ont l’habitude de faire diffuser des messages sur tous les médias pour nous inviter à ce lavage fréquent. La transmission d’un virus se fait surtout directement par l’air que nous respirons mais elle peut aussi se faire par les mains. Imaginez que vous ayez une délicieuse gaufre couverte de sucre glace et qu’au moment de croquer dedans vous éternuiez. Un petit nuage de sucre s’envole et retombe… en partie sur un ami proche de vous. Si cet ami porte un T-shirt foncé, on voit bien les marques blanches dessus mais si son T-shirt est blanc on ne voit pas grand-chose… pourtant le sucre s’est bien déposé dessus de la même manière. De même les particules virales (qui, elles, sont invisibles à l’œil nu) ne sont pas que dans l’air que nous pouvons respirer. Elles restent plus ou moins longtemps (suivant la température, l’humidité, l’aération) en suspension dans l’air puis se déposent sur des objets et des surfaces, et elles y restent actives parfois longtemps, jusqu’à plusieurs jours suivant la nature du support. Au cours de la journée nous portons, plus ou moins machinalement, nos mains à notre visage, à notre nez, notre bouche, notre menton, nos yeux, nos oreilles. Lorsque celui qui est porteur d’un virus porte la main à son visage il y récupère des particules virales qu’il va ensuite aussi déposer sur objets ou surfaces. La personne qui ensuite se saisit de l’un de ces objets ou pose la main sur l’une de ces surfaces, risque de récupérer dessus le virus et lorsqu’elle portera ensuite sa main à son visage, des particules virales pourront être aspirées lors de l’inspiration et se retrouver dans ses poumons. Qui a touché avant nous la poignée de cette porte, cette barre dans le métro, ce paquet de spaghettis dans les rayons du supermarché, la poignée du caddie, ce boîtier de carte bancaire, le dossier de cette chaise, le dessus de cette table ? C’est pour cela que nous devons nous laver les mains fréquemment et soigneusement, pour nous protéger, et encore plus si nous sommes porteurs d’un virus pour protéger les autres.

 

Ce qui précède montre pourquoi le risque de recevoir ou de transmettre la Covid est beaucoup plus important lorsque l’on est réuni pour boire ou manger. Une personne ayant la grippe ne viendrait pas, par simple bon sens, mais la moitié de celles ayant la Covid l’ignore donc est là. Dans ces rassemblements non seulement on ne porte plus de masque mais on porte très souvent à sa bouche boisson ou aliments. En plus on parle et parfois fort pour être entendu lorsqu’il y a trop de bruit ambiant ou lorsque l’on s’adresse à quelqu’un qui n’est pas juste à côté. Lorsque l’on parle à son voisin on se tourne vers lui et, si l’on est malade (alors que l’on se croit bien portant), on envoie vers lui des particules invisibles dans l’air qu’il va respirer, qui retombent ensuite sur la table, sur son verre, son assiette ou son pain. Et, en général cela se voit même dans les plus raisonnables rassemblements familiaux, plus on avance dans le temps du simple pot ou du repas, plus on parle fort, plus il y a d’éclats de rire et plus on se rapproche de l’un ou de l’autre. Et le tout, parler plus fort et oublier les risques, est bien sûr accentué par l’absorption de boissons alcoolisées. Et dans le même temps, notre respiration est automatiquement accentuée, augmentant la quantité d’air que l’on inspire et qui va jusqu’à nos poumons, et celle que l’on rejette. A l’opposé, par exemple dans les transports en commun, il peut y avoir plus de personnes, plus proches les unes des autres, mais qui portent toutes un masque et qui le plus souvent ne parlent même pas à leur voisin car elles ne le connaissent pas.

 

Si l’on tient absolument à se retrouver à plusieurs pour partager un bon repas, il est tout de même possible de le faire en limitant les risques de contagion... à condition de suivre au mieux des contraintes strictes. D’abord ceux qui se savent positifs ou ont de bonnes raisons de le craindre doivent attendre plusieurs jours la certitude de ne plus être contagieux pour se permettre ce genre de sortie... comme ils le feraient s’ils avaient la grippe. Ensuite il faut éviter d’être trop nombreux car le nombre favorise tous les dérapages (parler fort, consommation d'alcool, cris...). Il faut que ceux qui ont préparé boissons et plats, et ont dressé la table, l’aient fait après s’être soigneusement lavé les mains et en portant un masque, ce qui n’empêche pas de discuter avec les autres en même temps. Ensuite, au moment du repas, tout le monde doit porter le masque et ne l’enlever (en le prenant d’un côté par le lien, sans toucher la surface, et en le laissant pendre de l’autre côté sous l’oreille) que pour boire ou manger quelques bouchées et le remettre aussitôt après (par le lien, sans toucher la surface) pour participer aux conversations et rire avec les autres. Puis on enlève à nouveau son masque pour manger, puis on le remet aussitôt après et ainsi jusqu’à la fin du repas. Aux moments où l’on boit ou mange, puisque l’on ne porte plus de masque, on reste face à son couvert pour limiter au mieux ce que l’on souffle vers les autres ou dans l’air du lieu et ce que l’on inspire venant d’eux. Enfin ceux qui débarrassent le font en gardant leur masque puis se lavent soigneusement les mains. Certains diront que c’est bien compliqué, que c’est absurde ou que c’est une atteinte à leur liberté de faire ce qu’ils veulent comme ils le veulent. Pour moi c’est un moyen pour tout de même passer de bons moments avec d’autres en limitant les risques de nuire à la santé de l’un ou l’autre ou à la sienne. C’est l’altruisme opposé à l’égoïsme.

Enfin, pour revenir aux masques, il ne suffit pas de les porter, il faut ensuite veiller à ne pas faire n’importe quoi avec. Si vous l’avez porté c’est pour qu’il intercepte (autant que possible) les particules virales qui autrement auraient pu atteindre votre nez ou votre bouche. Il faut donc penser, lorsque vous l’enlevez, qu’il contient peut-être de telles particules. Il faut donc toujours le saisir par son lien, sans toucher sa surface, et autant que possible ensuite vous laver les mains. Si vous devez réutiliser le masque que vous avez porté, il va de soi qu’il ne faut pas le déposer chez vous sur une surface que vous toucherez ensuite, en particulier sur la table sur laquelle vous aurez plus tard votre fourchette, votre verre, votre pain… que vous porterez à votre bouche au moment du dîner.

 

Il ne faut pas dramatiser. Je n’ai d’ailleurs présenté aucun décompte macabre. Nous pouvons continuer à vivre, à bien vivre, à profiter de la vie, à rencontrer nos parents, nos amis, à circuler, travailler, nous cultiver, nous distraire, éventuellement en continuant à découvrir de nouvelles activités, de nouveaux sites… en apportant dans  le même temps, c'est nécessaire, une aide à tous ceux dont l’activité professionnelle est ralentie ou stoppée pour limiter les risques de contagion. Tout cela est possible à condition de respecter au mieux les gestes barrière et le port du masque partout où il est nécessaire. C'est une petite contrainte : on n’envoie pas ici des dizaines ou des centaines de milliers de jeunes se faire tuer à la guerre pour sauver le pays ! Cette petite contrainte, nous pouvons, nous devons tous l’assumer, en responsabilité, jusqu’à la découverte d’un traitement ou d’un vaccin efficace.

 

Gilles Chanteclair

 

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